De nouveaux résultats extrêmement intéressants montrent que l’exercice vigoureux provoque la relâche par les muscles d’un nouveau métabolite, le lactoyl-phénylalanine, qui provoque une diminution de l’appétit.
Les bienfaits de l’exercice régulier sur la santé ne sont plus à démontrer, avec pas moins de 35 maladies distinctes dont le développement est influencé, à divers degrés, par l’activité physique1. Pourtant, pour plusieurs personnes qui adhèrent à un programme d’exercice, ce ne sont cependant pas ces bénéfices qui représentent la principale source de motivation, mais surtout la perspective de perdre du poids. Cet objectif peut être frustrant, car il est généralement admis que l’exercice a généralement un impact plutôt mitigé sur le poids corporel, et ce, pour deux principales raisons :
- les quantités d’exercice requises pour brûler les calories contenues dans certains aliments peuvent être astronomiques et pratiquement impossibles à réaliser sur une base quotidienne (les 1000 calories contenues dans un simple trio de fast-food nécessitent une bonne heure de jogging) ;
- la dépense énergétique accrue entraînée par l’exercice exerce souvent une hausse de l’appétit pour compenser les calories perdues.
Un nouveau métabolite
Ce lien entre l’appétit et l’exercice est cependant très mystérieux : certaines personnes se sentent terriblement affamées dans les heures qui suivent un entraînement, tandis que d’autres ont au contraire une perte d’appétit. Puisque l’appétit est en majeure partie contrôlé par des substances qui agissent au niveau du cerveau (les hormones leptine et ghréline, par exemple), il est donc possible que ces différences soient causées par la présence (ou l’absence) de molécules relâchées dans la circulation en réponse à l’exercice.
Pour tester cette possibilité, des scientifiques ont utilisé des approches biochimiques modernes extrêmement sensibles (appelées métabolomiques), capables de détecter les variations dans la quantité d’un grand nombre de molécules provoquées par une condition donnée. Dans ce cas-ci, les chercheurs ont placé des souris sur des tapis roulants et les ont fait courir à des vitesses de plus en plus élevées jusqu’à épuisement.
En analysant la composition du sang avant et après l’exercice, ils ont ainsi pu comparer les niveaux de milliers de molécules dans le sang des rongeurs et identifier celles qui présentaient les plus grandes variations. Un travail époustouflant !
De toutes les molécules analysées, c’est un métabolite nommé lactoyl-phénylalanine (lac-Phe) qui a montré la plus grande augmentation à la suite de l’exercice intense2. Cette molécule est un dérivé de l’acide aminé phénylalanine liée au lactate, formé par une enzyme (la CNDP2) en réponse aux grandes quantités de lactate généré par le métabolisme musculaire lors de l’exercice.
Ce phénomène semble être une adaptation physiologique largement répandue chez les mammifères, puisque des hausses importantes de lac-Phe à la suite de l’exercice ont également été observées chez les chevaux de course (un des animaux présentant les plus grandes performances athlétiques) et chez les humains soumis à des entraînements de haute intensité.
Baisse d’appétit
Des expériences subséquentes suggèrent que le lac-Phe pourrait jouer un rôle dans le contrôle de l’appétit post-exercice. Par exemple, l’administration de ce métabolite à des souris obèses, qui mangent généralement avec beaucoup d’appétit, a provoqué une diminution de 30 % de leur apport calorique dans les 12 heures suivantes. Cette diminution d’appétit semble vraiment due au lac-Phe, car des souris génétiquement modifiées dépourvues de CNDP2, et donc incapables de former le lac-Phe, ont au contraire montré une augmentation de l’appétit post-exercice.
L’étude suggère que l’intensité de l’exercice détermine la quantité de lac-Phe générée par les muscles.
Par exemple, lorsque des volontaires ont été soumis à un exercice très intense (plusieurs épisodes de 30 secondes de vélo stationnaire à intensité maximale, entrecoupées de pauses), les taux sanguins de lac-Phe ont augmenté de 10 fois comparativement au repos. Une hausse de plus faible intensité (2,5 fois) a été observée après un effort moins exigeant (exercice de résistance avec des poids), tandis qu’un exercice plus doux (vélo stationnaire à vitesse modérée pendant 90 min) a augmenté les taux de lac-Phe de 1,5 fois environ.
Autrement dit, les quantités de lac-Phe générées par les muscles sont directement proportionnelles à l’intensité de l’effort déployé, ce qui suggère que plus l’exercice est exigeant, meilleure sera la réduction de l’appétit post-exercice.
Le meilleur moyen d’éviter les fringales après l’entraînement et l’absorption d’un excès de calories semble donc d’augmenter l’intensité de l’exercice réalisé. Cela a beaucoup de sens d’un point de vue évolutif, car une dépense d’énergie soudaine et intense peut être interprétée par le cerveau comme un signal de fuite face à un danger. Dans une telle situation, ce n’est pas le moment de penser au prochain repas !
♦ 1. Booth FW et coll. Lack of exercise is a major cause of chronic diseases. Compr. Physiol. 2012 ; 2 : 1143-211.
♦ 2. Li VL et coll. An exercise-inducible metabolite that suppresses feeding and obesity. Nature, publié le 15 juin 2022.
L'origine de l'effet coupe-faim de l'exercice intense - Le Journal de Montréal
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