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Saturday, January 21, 2023

Le ciel nocturne perd de plus en plus ses étoiles - Radio-Canada.ca

Une personne regarde l'horizon dans une nuit étoilée.

Le ciel nocturne perd de plus en plus ses étoiles.

Photo : iStock

Des observations effectuées par des scientifiques citoyens partout dans le monde au cours des 12 dernières années révèlent que les étoiles dans le ciel nocturne deviennent de plus en plus difficiles à observer en raison de l'augmentation rapide de la pollution lumineuse.

Grâce aux 51 351 observations à l'œil nu récoltées par les participants à l’effort international, il a été établi que la luminosité artificielle du ciel a augmenté en moyenne de 9,6 % annuellement entre 2011 et 2022 dans le monde.

La Voie lactée s'étend au-dessus de l'Observatoire du Mont-Mégantic.

La Voie lactée s'étend au-dessus de l'Observatoire du Mont-Mégantic.

Photo : RICEMM/Guillaume Poulin

Ainsi, un enfant né dans une région où 250 étoiles étaient visibles verrait probablement moins de 100 étoiles au même endroit 18 ans plus tard, notent les auteurs dans leurs travaux publiés dans la revue Science (Nouvelle fenêtre) (en anglais).

Le coordonnateur scientifique de la Réserve internationale de ciel étoilé du Mont-Mégantic (RICEMM), Rémi Boucher, n’est pas surpris par ces résultats.

« Les études dans le passé se servaient de données satellites […] qui montraient une augmentation de la pollution lumineuse d'environ 2 % par année entre 2014 et 2021, mais une petite diminution de l’ordre de 0,8 % par année en Amérique du Nord. »

— Une citation de  Rémi Boucher, RICEMM

Cette grande différence avec les observations humaines est liée à la sensibilité spectrale des satellites, particulièrement de l’un d’eux dont les données ont surtout été utilisées dans l’analyse de la pollution lumineuse nocturne, explique M. Boucher.

En effet, l’instrument VIIRS (Suite de radiomètres pour imageurs dans l'infrarouge et le visible), installé sur le satellite Suomi de l'Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique, récolte la vaste majorité des données concernant la pollution lumineuse.

« Au départ, ce satellite n’a pas été conçu pour mesurer la pollution lumineuse, même s’il peut donner une idée du phénomène. S’il avait été conçu pour analyser la pollution lumineuse, il aurait été équipé différemment. »

— Une citation de  Rémi Boucher, RICEMM

En gros, il est aveugle à la lumière bleue, explique M. Boucher. Il va surtout voir le vert, le jaune, le rouge et même un peu au-delà du rouge, dans le proche infrarouge.

Cette réalité, jumelée à la révolution technologique dans le domaine de l'éclairage extérieur dans les années 2010 avec l’arrivée des diodes électroluminescentes (DEL) sur le marché (un éclairage blanc émettant beaucoup de lumière bleue), est certainement responsable des faibles hausses annuelles observées à l’aide des données satellites.

De nombreuses villes changent actuellement l'éclairage de leurs rues et optent pour un éclairage DEL.

De nombreuses villes ont changé l'éclairage de leurs rues et ont opté pour un éclairage DEL. (Photo d'archives)

Photo : iStock

Un monde mal éclairé

Les images satellites sont donc souvent aveugles aux longueurs d'onde de la lumière produite par l’éclairage qui domine maintenant l'éclairage urbain, notent dans leurs travaux le Dr Christopher Kyba, du centre allemand de recherche des sciences de la Terre, et ses collègues allemands et américains, qui estiment que la lumière artificielle durant la nuit a augmenté exponentiellement au cours du siècle dernier, même si son évolution globale reste mal comprise.

Image du ciel nocturne terrestre.

Image composée du ciel nocturne terrestre obtenue grâce aux données récoltées par l'instrument VIIRS du satellite Suomi.

Photo : NASA/Goddard Space Flight Center/Miguel Román

C’est pour mieux cerner cette évolution de la luminosité de fond du ciel nocturne, et parce qu’ils se doutaient bien que le portrait satellitaire du ciel nocturne était incomplet, que les chercheurs ont demandé à des participants de comparer les cartes du ciel nocturne à différents niveaux de pollution lumineuse à ce qu'ils pouvaient voir de leurs propres yeux par l’entremise de la plateforme en ligne Globe at Night. Cet exercice de science participative permet de regrouper les observations de la luminosité du ciel nocturne.

Selon les résultats, la luminosité du ciel nocturne due à la lumière artificielle a augmenté d'environ 7 à 10 % par an dans la lumière visible. Cette augmentation est bien plus élevée que les estimations de l'évolution des émissions de lumière artificielle (environ 2 % par an) basées sur les mesures des satellites.

Le Québec avant-gardiste

En 2007, l'ingénieure Chloé Legris de l'ASTROLab du Mont-Mégantic a reçu le prix de Scientifique de l'année de Radio-Canada pour avoir piloté le projet de création de la première réserve internationale de ciel étoilé en zone habitée au monde.

Pas moins de 34 municipalités incluses dans la réserve protégée de 5500 km2 ont élaboré des règlements sur l'éclairage extérieur qui ont contribué à contrôler et à limiter la croissance de la pollution lumineuse de la région, qui avait doublé au cours des 20 années précédentes.

Un nouvel éclairage de rue à Stratford.

Un nouvel éclairage de rue à Stratford, l'une des 34 municipalités de la Réserve de ciel étoilé. Les DEL ambre n'émettent pratiquement aucune lumière bleue et leur utilisation permet de réduire la pollution lumineuse et ses effets sur l'environnement nocturne, contrairement aux DEL blanches.

Photo : RICEMM/

Environ 2500 appareils d'éclairage ont été remplacés, ce qui a permis de réduire de 25 % la pollution lumineuse de la zone et de diminuer la consommation d'énergie d'environ 1,3 gigawattheure par an.

La réalisation a culminé avec la reconnaissance de la réserve par l'UNESCO et l'International Dark Sky Association.

Il existe actuellement 201 zones de ciel étoilé certifiées dans le monde et le Canada en compte cinq, deux au Québec (Parc du Mont-Bellevue et Mont-Mégantic), deux en Ontario et une en Alberta.

La Réserve du Mont Mégantic aujourd’hui

Les données recueillies, non pas avec l'œil humain mais avec des d'instruments, dont des caméras, montrent que la pollution lumineuse est stable dans la réserve.

La raison? Dans la réserve, le portrait est différent parce que les DEL blanches sont très peu utilisées. Il y en a malheureusement qui sont installées malgré la réglementation, si bien que les données satellites sont probablement plus réalistes, indique Rémi Boucher.

Mesures de la luminosité du ciel nocturne prises à partir du mont Mégantic en 2007 et en 2017.

Mesures de la luminosité du ciel nocturne prises à partir du Mont-Mégantic au moment de son inauguration en 2007, ainsi que 10 ans plus tard. La qualité du ciel étoilé demeure excellente, et ce, malgré l'augmentation de la population dans la région.

Photo : U.S. National Park Service/Chad Moore/Chris Luginbuhl/Jeremy White

On a fait une mesure très précise 10 ans après la création de la réserve. On voyait que la pollution lumineuse n’avait pas augmenté, et qu’elle avait même légèrement baissé, malgré une augmentation de la population de l'ordre de 12 %. […] On a réussi à maintenir la santé du ciel étoilé de la réserve, se réjouit Rémi Boucher, qui s’inquiète toutefois de l’augmentation faramineuse du nombre de satellites en orbite terrestre.

Une trentaine de satellites qui se suivent l'un après l'autre illuminent le ciel la nuit.

Un train de satellites de Starlink illumine le ciel nocturne.

Photo : Fournie par Marco Langbroek

Un ciel pollué… par des satellites

Plusieurs entreprises, dont SpaceX et son service d’accès à Internet Starlink, lancent depuis quelques années des milliers de satellites qui forment des constellations. D’ici 2025, cette entreprise privée pourrait disposer de 12 000 satellites en orbite. Et ce n’est qu’un début.

« Le nombre croissant de satellites est assez décourageant. C'est extrêmement préoccupant pour moi, dont le travail est de protéger le ciel étoilé. C'est difficile de se battre contre ça… »

— Une citation de  Rémi Boucher

Protéger la nuit

M. Boucher rappelle que la protection du ciel étoilé est essentielle pour assurer la capacité des astrophysiciens à effectuer leur travail. Le projet de ciel étoilé était au départ centré sur la protection de la capacité d'observation de l'Observatoire du Mont-Mégantic, qui alimente les recherches en astrophysique de plusieurs institutions, dont les universités de Montréal et Laval.

« L'accès au ciel étoilé, c'est littéralement notre fenêtre vers l'Univers. »

— Une citation de  Rémi Boucher, RICEMM

Mais la protection du ciel étoilé ne sert pas uniquement à l’avancement de la connaissance.

« Les conséquences de la lumière artificielle sont importantes sur les animaux, par exemple sur la migration des oiseaux, les pollinisateurs comme les papillons de nuit ou encore les lucioles, dont les populations sont en baisse. »

— Une citation de  Rémi Boucher, RICEMM

La réduction de la lumière nocturne est aussi une question d’économie d’énergie et de lutte contre les changements climatiques. Il y a aussi l’aspect gaspillage. Au Québec, l’électricité est une ressource renouvelable, mais ailleurs dans le monde, d’autres sources d’énergie produisent beaucoup de gaz à effet de serre, indique M. Boucher, qui estime aussi qu’il ne faut pas oublier toute l’importance de préserver le contact des humains avec la nature.

Rien n’est acquis

J'espère que ce genre d'études là va montrer que rien n’est encore gagné, dit Rémi Boucher.

« Les politiques [...] concernant l'éclairage extérieur n’aident pas en ce moment à réduire la pollution lumineuse. Il y a des petites victoires, il y a de plus en plus d’endroits de ciel étoilé, mais clairement, j’estime qu’on serait dû pour une politique nationale concernant la pollution lumineuse. »

— Une citation de  Rémi Boucher, RICEMM

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