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Tuesday, March 28, 2023

Les concurrents se préparent à l'arrivée d'Apple classique - Le Devoir

Apple a lancé mardi Apple Music Classical, né du rachat de Primephonic en août 2021. Apple visait alors à offrir « une expérience unique, qui sera réellement la meilleure au monde », mais les concurrents affûtent leurs armes. Après avoir cerné, lundi, l’univers concurrentiel, nous proposons d’examiner les enjeux et les terrains sur lesquels tous attendent l’arrivée du géant.

« Dans notre modèle, nous rétribuons les producteurs à la seconde de musique écoutée. Il faut que l’argent récolté permette l’enregistrement d’oeuvres plus complexes. Voilà l’enjeu, et nous faisons partie de la solution », affirme Chris O’Reilly, fondateur et président-directeur général de Presto Music Streaming Service, qui s’est lancé le 6 mars dernier à la surprise générale.

Ce modèle de paiement a été inauguré dans le métier par Idagio : « Nos calculs se font par seconde et par utilisateur. C’est la méthode la plus précise », nous explique le fondateur et président-directeur général d’Idagio, Till Janczukowicz.

Le classique défavorisé

L’enjeu capital de la rétribution est amplifié en musique classique. Didier Martin, président-directeur général de l’éditeur indépendant Outhere Musique, a communiqué au Devoir le classement de ses sources de revenus de streaming : Idagio devance Qobuz, Tidal, Deezer et Apple. Les mastodontes Spotify et YouTube sont 7e et 8e, derrière Amazon.

« C’est logique : plus la plateforme touche un large public, plus le revenu est dilué et va vers les gros utilisateurs », nous dit Didier Martin. Car la rétribution, selon la règle du market centric (« centré sur le marché »), opère de la manière suivante : l’utilisateur paie un droit d’accès à un contenu illimité, et les clics sont comptabilisés par plages. Les producteurs sont ensuite rémunérés au prorata des parts de marché. Les gros joueurs emportent le magot. C’est ce qui explique en ce moment le phénomène des « faux clics » pour augmenter ces parts.

Le piège pour le classique tombe sous le sens : la 6e Symphonie de Mahler, c’est 4 clics pour une oeuvre de 90 minutes et 120 musiciens à payer. Un pianiste seul dans un studio qui aligne 5 notes de ce que l’on appelle désormais le « second souffle de la musique classique moderne » peut produire à la chaîne matière à 30 clics d’une musique d’ascenseur qui se trouvera dans des listes de lecture « paix de l’âme » ou « joie de la conscience ».

Si Apple Music se trouve devant Spotify dans le palmarès Outhere alors que Spotify, comme nous l’écrivions lundi, a plus du double d’abonnés payants, c’est pour deux raisons. La première est qu’Apple paye 0,76 cents américains par stream alors que Spotify paye entre 0,26 et 0,49, comparativement à YouTube, 0,067 cent !

La seconde est un des enjeux du marché classique : la mise en avant et la qualité éditoriale du service. Loin de jeter les nouveautés en pâture dans le flux général, comme chez Spotify, un service qui veut intéresser les mélomanes classiques doit contextualiser l’offre. Pour M. Zisman, directeur musique chez Qobuz, sa clientèle vient « pour la qualité sonore, mais aussi pour le contenu unique, adapté à la musique classique : les métadonnées, les livrets numériques et un large choix de chroniques ».

La course à l’exclusivité

Lorsqu’on demande à Till Janczukowicz ce qui restera à Idagio, qui campe sur le format Flac, lorsqu’Apple, qui annonce de la haute définition sonore avec une base de données consacrée au classique, sera arrivé, la réflexion se veut plus générale. « L’invention de l’enregistrement a généré le star-système et l’industrie musicale, une industrie d’un substitut musical devenu la forme de divertissement numéro un. Mais ce qui se perd, c’est l’aspect social : artistes et auditeurs vibrent ensemble lors de concerts. On peut restaurer cette sensation de communauté par l’éducation. Nous avons ainsi testé en 2022 des symposiums en temps réels. » Idagio va miser sur cette « université de luxe », payante, où Thomas Hampson parle de Mahler, la fille de Leonard Bernstein raconte son père et Francesca Zambello explore le Ring de Wagner pour générer un contenu exclusif précieux.

Le contenu exclusif est aussi une avenue suivie par Qobuz, où, nous dit Marc Zisman, « le classique est le deuxième genre parmi les plus téléchargés et le quatrième parmi les plus écoutés, représentant 17 % des téléchargements et 15 % des streams ». « Nous travaillons à développer des partenariats exclusifs au niveau mondial avec des labels aussi prestigieux que Château de Versailles Spectacles ou Musique sacrée à Notre-Dame de Paris », ajoute-t-il.

Une entente exclusive entre Hyperion et Presto aurait été logique, puisque Simon Perry d’Hyperion, qui se plaignait tant du market centric, y aurait sans doute trouvé son compte. La discussion n’a pas eu lieu : « Simon négociait la vente d’Hyperion depuis août, il avait d’autres préoccupations », dit Chris O’Reilly.

Dans notre modèle, nous rétribuons les producteurs à la seconde de musique écoutée. Il faut que l’argent récolté permette l’enregistrement d’œuvres plus complexes. Voilà l’enjeu, et nous faisons partie de la solution.

 

Le mode de rétribution d’Apple classique sera scruté. « Si c’est par plage, c’est inéquitable, même à l’intérieur du classique », relève Chris O’Reilly : « Les Variations Goldberg, ce sont 32 plages pour une heure, alors que la 4e Symphonie de Bruckner, c’est 4 plages pour une heure. Chez Apple, les Goldberg seraient donc payées 8 fois plus. Qui pourra donc à terme enregistrer des symphonies dans un écosystème pareil ? En étant un service jazz et classique qui ne se dilue pas avec la pop, nos retours à l’industrie classique vont être 20 à 30 fois supérieurs à ceux d’Apple. »

Les uns et les autres affûtent donc leurs arguments à l’image de cette « écoresponsabilité économique ». Qobuz mise sur « la haute qualité sonore, le contenu éditorial et la qualité de [ses] recommandations ». Idagio veut aller au-delà du streaming et restaurer la relation artiste-consommateur. Presto, qui s’est jeté dans le grand bain, vise à accélérer son « intégration dans les matériels tels que Bluesound et Sonos ». Cette intégration est le grand avantage concurrentiel de Tidal et Qobuz, qui opèrent sur une base de données non spécifique au classique, mais sont associés à aux grandes marques de la haute-fidélité.

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