Rechercher dans ce blog

Tuesday, August 22, 2023

Une bande dessinée sur le scientifique et trafiquant d'armes Gerald Bull - Radio-Canada.ca

Après avoir consacré une bande dessinée biographique au légendaire Leonard Cohen en 2021, l’auteur et illustrateur Philippe Girard s'intéresse maintenant à une figure canadienne controversée et méconnue.

Dans sa nouvelle BD intitulée Supercanon! Le marchand d'armes qui visait les étoiles, publiée chez Casterman, Philippe Girard dresse un portrait romancé du scientifique canadien Gerald Bull, assassiné à Bruxelles, en 1990.

Rencontre avec l’auteur.

Philippe Girard, dans quel contexte vous êtes-vous d’abord intéressé à l’ingénieur d’origine ontarienne, Gerald Vincent Bull?

Philippe Girard : Il m'intéressait parce que, en 1990, quand a eu lieu la première guerre du Golfe, moi, j'avais 18 ans. Puis avec mes amis, on avait peur qu'il y ait la conscription au Canada, qu'on soit forcé d'aller se battre. Et j'avais un ami à cette époque-là, qui étudiait au Collège militaire royal de Saint-Jean. Il étudiait pour être ingénieur. Et il nous avait dit : C'est paradoxal, parce que c'est un Canadien qui a fourni les armes à l'Irak, mais le Canada fait partie de la coalition de la liberté, qui se bat contre l'Irak.

Il y avait un paradoxe là-dedans. C'est à ce moment-là, donc, qu’il nous avait parlé de Gerald Bull. C'est comme ça que j'ai appris à le connaître. C'est une idée qui est restée dans ma tête assez longtemps. Enfin, jusqu’à il y a quelques années, quand mon éditeur Casterman est revenu vers moi, puis m'a demandé de faire un autre livre avec eux. Après Leonard Cohen, ils voulaient une histoire sur un scientifique. Quelqu'un qui avait une influence importante sur le 20e siècle.

Dans une bibliothèque, l'auteur pose pour la caméra en tenant son ouvrage.

L'auteur Philippe Girard avec sa nouvelle BD Supercanon!

Photo : Radio-Canada

On a décidé de créer une fiction autour de Gerald Bull, en inventant un personnage qui s'éloignait de la réalité, mais qui nous permet quand même de mettre en lumière les aspects importants de son travail, notamment son génie, et l'impact qu'il a eu sur l’histoire du 20e siècle.

Qu’est-ce qui fait partie de la vraie vie de Gerald Bull dans cette histoire? Ses relations avec la Chine, les États-Unis et l'Irak, est-ce que tout ça est ancré dans la réalité?

Philippe Girard : Tout ça est vrai.

Il a été deux fois orphelin de sa mère, ce qui est quand même un drame très important dans la vie d'un enfant. Il perd sa mère biologique très jeune, et sa mère adoptive, quelques années plus tard. Donc, on comprend que la blessure qui vient avec ce double deuil est fondamentale dans la construction de sa personnalité.

C'est un gars extrêmement brillant, le plus jeune doctorant de l'histoire du Canada. C’est vrai! Et c’est un gars qui rêvait de canon très jeune. Il voulait faire quelque chose de particulier avec ses canons. Il ne voulait pas faire la guerre. Lui, il voyait les canons comme un outil qu'on aurait pu utiliser pour envoyer des satellites dans l'espace, à moindre coût. Donc, pour améliorer la vie des gens.

Il a commencé à élaborer ses grands canons. Rapidement, l'industrie de l'armement s'est intéressée à lui parce qu’il avait une vision complètement originale sur cette technologie-là. Ça aussi, c'est vrai.

Et, tranquillement pas vite, ses canons ont commencé à circuler à travers un paquet de mains. Ils ont abouti entre les mains des Sud-Africains, des Chinois, et ultimement entre les mains de Saddam Hussein. Tout ça est très vrai.

Ce que j'ai inventé, en fait, c'est davantage la psychologie du personnage, sa personnalité. J'ai essayé de me mettre dans la peau d'un homme qui se sent comme une bête traquée, qui sait qu’il a une cible dans le dos et qui comprend qu’il joue un jeu dangereux. Ça, c'est un effort d'empathie. C'est une licence poétique que je me suis donnée pour être capable de créer un personnage auquel le lecteur va croire. Je rentre dans sa tête-là, j'élabore le rêve qui nourrit tout son parcours, en fait.

Une page de la bande-dessinée «Supercanon!» où est dessinée une voiture qui circule dans un cimetière.

Une page de l'album «Supercanon! Le marchand d'armes qui visait les étoiles», de Philippe Girard.

Photo : Radio-Canada / Valérie Cloutier

Le personnage, à un moment donné, perd sa réputation. Il est détesté de tous. Diriez-vous qu’il a été pris dans un engrenage, avec les militaires?

Philippe Girard : À cause du contexte et par la force des choses, parce qu’il faisait progresser la balistique comme personne au 20e siècle avant lui, évidemment qu'il a attiré l'attention des militaires! Mais je ne sais pas si on peut appeler ça un engrenage. J'ai envie de dire qu'il y avait un contexte de Guerre froide. Des conflits, il y en a tout le temps sur la planète, aussi.

Donc, lui, à cause de ce contexte géopolitique, il s'est retrouvé au centre, vraiment en plein centre, d'une dynamique qui n'était pas du tout celle qu’il cherchait.

Sur le plan de la créativité, si on parle du dessin et de l'élaboration de la bande dessinée, qu’est-ce qui vous a stimulé dans ce projet?

Philippe Girard : Il y a beaucoup de choses, en fait, qui me stimulaient, mais le principal élément, c'est la couleur. Je voulais utiliser la couleur comme une façon de codifier, de faire comprendre au lecteur ou à la lectrice qu’à certains moments, on est dans la tête du personnage, on est dans ses rêves. Puis à d'autres moments, on est dans la réalité.

Donc, il y a beaucoup de pages roses dans le livre, qui sont comme un indice que je donne, que là, on est dans le rêve, on est dans la subjectivité. C'est intéressant parce que j'ai donné à mon personnage un regard singulier, très personnel sur le monde. Et je pense que ça aussi, c'est très réel. Le vrai Gérald Bull voyait le monde avec des yeux différents. Il ne voyait pas les canons comme des objets qui servaient à faire la guerre. Ils voyaient des canons comme des objets qu'on pouvait utiliser pour faire avancer la science, et je voulais que ce regard se sente à travers la couleur.

Votre héros est un antihéros…

Philippe Girard : Oui! Mais, je pense que les antihéros sont les héros les plus intéressants, en fait parce que c'est toujours ceux qui nous montrent en quoi le monde n'est pas celui qu'on pense qu'il est, et en quoi le monde est tellement différent de notre interprétation, finalement. Je pense qu'à ce titre-là, si c'est un antihéros, c’est très bien. Mais moi, j'ai développé une affection immense pour mon personnage en travaillant dessus. J'ai découvert un homme bon, honnête, un homme très intelligent et un homme qui avait réellement un rêve. Un rêve auquel il était accroché et qu'il ne voulait pas laisser tomber.

À un moment donné, je suis parti. Je suis allé en Belgique. Je voulais voir les lieux où Gerald Bull avait ses bureaux, où il avait vécu, où il a été assassiné.

Et, j'ai réussi à y aller. J'ai réussi à rentrer dans l'édifice où il a vécu, et où il est mort.

Devant sa porte, j'ai ressenti le sentiment très désagréable d'avoir une cible dans le dos et d'être un homme traqué. De sentir qu'il y a des gens qui vous veulent du mal, c'est un matériau que j'ai ramené avec moi. Je vous dirais que c’est peut-être plus précieux que les photos que j'ai prises sur place. Le sentiment d'être constamment surveillé, de peut-être vivre avec une bombe à retardement. [...] Évidemment, ça a créé de la proximité entre moi et le personnage. Ça m'a donné énormément de sympathie pour lui.

Est-ce que vous sentez que c'est un personnage qui est plus ou moins connu, et que votre livre va contribuer à le faire connaître?

Philippe Girard : Je présume que dans le monde de la balistique, il doit être très connu, mais j'avais l'impression qu'il ne l’était pas pour monsieur madame Tout-le-Monde.

Les satellites, ce sont des avancées technologiques concrètes qui sont utilisées tous les jours pour nos téléphones, nos ordinateurs, la télévision. Tout ça, lui, il en rêvait il y a 50 ans, donc pour moi ce personnage-là, c'est quelqu'un qu'on gagne à connaître. Parce qu'il a réellement eu un impact sur nos vies. Et, il me semble que c'est quelqu'un qui a été injustement traité par l'histoire aussi. On l’a dépeint comme un mauvais garçon, mais à la base, c'était un homme bon, quelqu'un qui cherchait réellement à améliorer la qualité de vie des êtres humains en général.

Les propos de cette entrevue ont été édités à des fins de clarté et de concision.

Crimes et délits
Énergies renouvelables
Agriculture
Autochtones
Matières résiduelles
Crimes et délits
Énergies renouvelables

Adblock test (Why?)


Une bande dessinée sur le scientifique et trafiquant d'armes Gerald Bull - Radio-Canada.ca
Read More

No comments:

Post a Comment

C'est maintenant ou jamais pour saisir les Samsung Galaxy Buds 2 à prix défiant toute concurrence - Tech & Co

Voici une offre que les mélomanes ne vont pas bouder. Rue du Commerce vous offre une remise de 7 % sur les Samsung Galaxy Buds 2. Vous aim...