Magnifique, audacieux, complexe, parfois déjanté… The Ascent est un jeu aux ambitions démesurées. Ambitions qui, en fait, ne sont limitées que par les quelques aspérités de son code et un scénario dégageant une toute petite odeur de déjà vu.
Développé par le studio suédois indépendant Neon Giant et publié par Curve Digital, The Ascent est un jeu d’action et de tir de science-fiction se déroulant dans un futur lointain, voire très lointain. Sur la planète Veles, contrôlée par la mégacorporation The Ascent Group, les travailleurs débarquent par milliers dans l’espoir de trouver une vie meilleure. Ce qu’ils trouvent, en fait, est plutôt une vie de labeur forcé, en quelque sorte, à deux doigts de l’esclavage: leur contrat de travail est bien souvent impossible à rembourser avec leurs maigres revenus.
Les voilà donc condamnés à suer sang et eau dans les profondeurs d’une gigantesque arcologie, une ville-nation que l’on imagine faire plusieurs kilomètres de haut, où les classes sociales et économiques sont réparties selon la structure habituelle: les puissants au sommet, dans des corridors étincelants de propreté, et les pauvres tout en bas, dans la crasse, le bruit et la violence.
Entre les deux, vous: un illustre inconnu d’abord chargé, par votre patron, de réparer un simple problème informatique qui entraîne des conséquences disons nauséabondes en matière de traitement des eaux usées. Sauf que voilà, The Ascent Group fait soudainement et mystérieusement faillite, et tous les groupes, petits et grands, veulent maintenant leur part du gâteau. Il faudra tenter d’y voir plus clair. Et surtout de survivre.
Car The Ascent est un jeu de combat. Un twin-stick shooter, pour être plus précis, où votre personnage, en vue du dessus, sera appelé à tuer des centaines, voire des milliers d’ennemis, qu’il s’agisse de monstres des profondeurs, de robots ou encore de combattants humains ou extraterrestres. Si le titre est aussi décrit comme un « jeu de rôle », cet aspect consiste surtout à améliorer les diverses caractéristiques qui permettent d’assassiner des ennemis plus efficacement et plus rapidement.
Cela étant dit, il n’y a rien de mal à offrir un jeu de combat. Une partie de l’univers cyberpunk, après tout, surtout dans le monde du jeu vidéo, consiste à utiliser une grande quantité de morceaux d’armure et d’armes en tous genres. Qui n’a jamais vu ces armes à énergie, ces missiles et ces casques avec multiples lentilles et autres appareils optiques? The Ascent a tout cela, et en grand nombre.
En fait, le titre donne l’impression de se promener à l’intérieur de quelque chose qui rend hommage à la fois à Neuromancer, la bible du genre, mais aussi à Johnny Mnemonic, entre autres, Akira ou encore Total Recall. La technologie a continué de progresser, mais certaines structures économiques et technologiques ne semblent pas avoir changé en quelques siècles. Le traitement des déchets, notamment, semble occuper un espace important dans The Ascent. Plutôt que de nous offrir constamment des allées bien lisses, on consacre une bonne partie du jeu à zigzaguer entre les piles de déchets, à enjamber des câbles qui traînent, et à slalomer sur des passerelles en métal rouillé où s’affairent des robots d’entretien.
C’est d’ailleurs l’un des aspects autant intéressant qu’un peu loufoque du jeu: l’arcologie doit abriter plusieurs millions de personnes, et ces gens vaquent à leurs occupations. Non seulement en se promenant ou en discutant dans les diverses « villes » réparties sur quelques niveaux, mais aussi dans le spatioport, dans les discothèques où vous rencontrez vos contacts, dans les rues où vous affrontez les méchants… Bref, tout cela donne parfois un beau bordel lorsque des civils se retrouvent pris entre deux feux et que les corps sont déchiquetés par les balles, les lasers et le souffle des explosions. Oh, il y aura bien quelqu’un pour vous rappeler, de temps en temps, que ce n’est pas bien, de réduire la population en charpie, mais on sent qu’il y a quelque chose d’inachevé, ici. Peut-être un système de réputation, avec des forces de sécurité qui pourraient s’en prendre à vous, le cas échéant? Ou peut-être qu’il s’agit d’une leçon en matière de nihilisme? Que l’arcologie est si grande, si populeuse, si délétère, que quelques centaines de civils de plus ou de moins n’aura aucun impact sur son fonctionnement?
Un monde aux frontières hélas visibles
Si Neon Giant a réussi un sacré coup en développant un titre à l’atmosphère fantastique, force est d’admettre que le travail n’est pas complet, et qu’il est encore nécessaire d’offrir de l’amour au code de The Ascent pour réellement en tirer quelque chose qui passera à l’histoire.
D’abord, les performances sont mal optimisées; est-ce la faute aux développeurs, qui forcent bien souvent des changements à l’angle de la caméra, non seulement pour permettre au joueur de mieux se déplacer, mais aussi pour mieux construire l’atmosphère en attirant l’attention sur des détails en particulier, au risque de créer des situations où les combats sont rendus plus difficiles?
On ne compte plus les ralentissements, légers ou plus marqués, qui surviennent justement dans des endroits où les perspectives s’empilent sur plusieurs étages, chacun de ceux-ci comportant son lot de détails qui tirent du jus de la carte graphique et du processeur. D’ailleurs, il a été rapidement nécessaire de diminuer la qualité des effets: si le jeu souhaitait ardemment gonfler toutes les options à « ultra », la geForce 2060 de ce journaliste a eut tôt fait de résonner comme un moteur de soufflerie. Un passage à l’option inférieure s’est avéré très utile.
Autre côté désagréable: le grind. Pour gagner des points d’expérience et monter de niveau, il faudra affronter des centaines et des centaines d’ennemis, souvent dans des corridors, des rues ou sur des plateformes qui ressemblent à s’y méprendre à d’autres corridors, rues et plateformes. Le pire exemple est d’ailleurs cette tendance à renvoyer le joueur toujours aux mêmes endroits, qui s’avèrent souvent être aux extrémités opposées de la « carte ». Oui, il existe bien un système de transport collectif – littéralement un métro, qui est gratuit –, mais pour cela, notre destination doit se trouver sur le même étage que notre point d’embarquement. Et comme cela est rarement clairement indiqué, on se retrouve à parcourir encore et toujours les mêmes coursives, en affrontant les mêmes ennemis. À moins que ceux-ci n’aient gagné en force et en résistance.
Car oui, The Ascent bonifie les points de vie, la puissance et la dangerosité des ennemis en fonction du niveau atteint par le joueur… quand les niveaux des ennemis ne sont pas déjà trop élevés. Il peut ainsi arriver de prendre un mauvais tournant et de tomber sur des méchants qui répandront notre cervelle sur le trottoir en quelques instants. Et après environ 17 heures de jeu, vers ce que l’on estime être la dernière mission du jeu, le niveau de difficulté est tel que même avec toutes les améliorations à notre disposition, survivre tient davantage de la chance que de la logique ou de l’adresse.
On voudrait adorer The Ascent; trouver que c’est un jeu extraordinaire, incroyable, un bijou de premier jeu pour un studio indépendant qui a réussi à créer un mastodonte. On trouve plutôt un titre trop ambitieux pour son propre bien qui aurait soit gagné à passer plus de temps en développement, soit mérité d’avoir des visées moins dantesques, histoire de pouvoir affirmer que le travail a été très bien fait.
Il n’en reste pas moins que le titre vient titiller cet amour de la science-fiction, du cyberpunk et des univers mêlant extraterrestres, dystopies et explosions provoquées par des robots meurtriers. Et pour cela, The Ascent occupe une place spéciale dans nos esprits.
The Ascent
Développeur: Neon Giant
Éditeur: Curve Digital
Plateformes: Xbox One et Series S/X, Windows (testé sur Windows/Steam)
Jeu disponible en français (interface et sous-titres)
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