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Sunday, May 7, 2023

L'IA pourrait remplacer « 80 % des emplois » d'ici quelques années, estime un chercheur - La Presse

(Rio de Janeiro) L’intelligence artificielle pourrait remplacer dans les prochaines années « 80 % des emplois », mais « c’est une bonne chose », estime lors d’un entretien avec l’AFP le chercheur américain Ben Goertzel.

Cheveux longs, lunettes rondes et chapeau à larges bords imprimé léopard, ce scientifique né au Brésil a fait sensation cette semaine à la conférence Web Summit de Rio de Janeiro, en présentant Grace, un robot-infirmière conçu pour s’occuper de personnes âgées dans les maisons de retraite.

C’est à lui qu’on doit le nom d’« Intelligence artificielle générale » (IAG), cette technologie majeure dotée de capacités cognitives humaines qui pourrait être au point « d’ici quelques années ». Il est à l’origine de la plateforme SingularityNET, destinée au développement décentralisé et démocratique de l’IA.

QUESTION : Que manque-t-il pour que soit mis au point un système d’intelligence artificielle avec des capacités cognitives humaines ?

RÉPONSE : « Si nous voulons des machines réellement aussi intelligentes que des personnes, et capables de réagir rapidement aux imprévus, il faudrait qu’elles soient capables de faire bien plus que ce pourquoi elles sont programmées. Et nous n’y sommes pas encore. Mais il y a des raisons de croire que cela pourrait arriver, non pas dans des décennies, mais dans quelques années ».

Q : Que pensez-vous du débat autour de ChatGPT ? Faudrait-il faire une pause de six mois dans les recherches, comme certains le préconisent ?

R : « Je ne crois pas qu’il faille faire une pause, parce que ce n’est pas une intelligence artificielle dangereuse […] Elle ne peut pas faire des raisonnements complexes, en plusieurs étapes, comme les scientifiques, ni inventer de nouvelles choses en dehors des données reçues. Elle ne peut pas élaborer des stratégies pour gérer de nouvelles situations, comme une pandémie, par exemple.

Certaines personnes disent qu’il faut arrêter les recherches parce que ce genre de système contribue à la désinformation. Mais alors, il faudrait interdire internet ? […] Je pense que nous devons vivre dans une société libre et, tout comme internet ne devrait pas être interdit, il ne faudrait pas interdire ça (ChatGPT) non plus ».

Q : Doit-on voir la possibilité que l’IA remplace des emplois comme une menace ?

R : « Avec l’arrivée prochaine de nouveaux systèmes du même type que ChatGPT, je pense que 80 % des emplois occupés par des humains pourraient devenir obsolètes. Mais je ne vois pas ça comme une menace, mais comme un avantage. C’est une bonne chose. Les gens vont trouver de meilleures choses à faire que travailler pour gagner leur vie. Pratiquement toutes les tâches administratives pourront être automatisées ».

« Le problème, ce sera la période de transition, quand les intelligences artificielles vont commencer à rendre obsolète un emploi après l’autre […] Je ne sais pas comment on va faire pour résoudre les problèmes sociaux occasionnés ».

Q : Quelles contributions les robots peuvent-ils apporter à la société aujourd’hui, et que pourraient-ils faire à l’avenir, avec l’IAG ?

R : « Ils peuvent faire plein de bonnes choses, comme Grace, le robot-infirmière. Aux États-Unis, un grand nombre de personnes âgées se sentent seules dans les maisons de retraites. Même si elles sont nourries, reçoivent des soins médicaux et regardent la télé, c’est insuffisant en termes de soutien social et émotionnel. Si on introduit dans ces espaces des robots humanoïdes qui répondent à leurs questions, écoutent leurs histoires, les aident à appeler leurs enfants ou à faire des achats en ligne, cela améliore leur vie ».  

« Dans ce cas, on ne supprime pas d’emplois, car il n’y a pas assez de candidats aux postes d’infirmiers ou d’aide-soignants. L’éducation pourrait également être un marché incroyable pour les robots humanoïdes, tout comme les travaux ménagers ».

Q : Comment réguler l’IA pour qu’elle ait un impact positif sur la vie des gens ?

R : « La gouvernance devrait être participative, impliquer la population, d’une certaine manière. Et c’est possible, techniquement parlant. Le problème, c’est que les entreprises qui financent la plupart des recherches dans l’IA ne s’intéressent pas au bien commun. Ce qu’elles veulent, c’est faire gagner un maximum d’argent à leurs actionnaires ».

Propos recueillis par Eugenia Logiuratto

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